Crise anglophone : les concessions de trop !
Le gouvernement, depuis le déclenchement des violences dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, en 2016, n’a cessé d’apporter des solutions sur les plans sociopolitique, économique et juridique. Bien trop peu pour certains entrepreneurs de guerre, qui estiment que les pouvoirs publics ne se sont pas suffisamment investis pour trouver des solutions aux problèmes posés.
Chaque décision du président Paul Biya, pour un retour à la paix dans lesRégions anglophones a été saluée des deux mains. Le 4 octobre 2019, l’ambassadeur des États-Unis, Peter Henry Barlerin a favorablement réagi suite à la décision du chef de l’Etat, «d’abandonner les poursuites contre Maurice Kamto et des autres membres et soutiens du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun arrêtés en début d’année suite à des manifestations électorales». Pour le diplomate américain, «Leur libération de prison aujourd’hui est une étape constructive vers la réduction des tensions politiques et l’affirmation de l’engagement du gouvernement en faveur des libertés fondamentales».
De la même manière que des leaders de partis politiques de l’opposition, des chefs religieux et la société civile s’étaient réjouis, le 3 octobre, de la remise en liberté de 333 détenus de la crise anglophone. «J’ai décidé ce jour de l’arrêt des poursuites pendantes devant le tribunal militaire, de 333 personnes arrêtées et détenues pour des délits commis dans le cadre de la crise dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest», avait affirmé dans un tweet, Paul Biya.
Des actes positifs qui font croire à l’Archevêque émérite de Douala, Christian Tumi, que «le président Paul Biya a la volonté de tout faire pour que ces problèmes soient résolus une fois pour toutes». Le vieux prélat s’exprimait à la veille du Grand dialogue national, organisé à Yaoundé, du 30 septembre au 4 octobre 2019, pour justement trouver des solutions à la crise anglophone.
Les récentes décisions de la plus haute autorité de l’Etat, que les Camerounais souhaitent voir s’étendre aux personnes emprisonnées pour atteinte à la fortune publique, et non pas seulement au Nord-Ouest et au Sud-Ouest qui représentent à peine 17% de la population du Cameroun, visent à ramener dans des délais brefs, le calme dans ces régions, en proie aux violences (assassinats et enlèvements de civils contre rançons, mise à sac des écoles et des hôpitaux, vol de bétail…) depuis 3 ans.
JUSTICE
Le gouvernement est aussi resté attentif aux revendications des avocats. En effet, la remise des exemplaires des Actes uniformes Ohada par le ministre d’Etat, ministre de la Justice, garde des Sceaux, Laurent Esso, à l’ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, Me Jackson Ngnié Kamga, en novembre 2016 avait suscité beaucoup d’espoir. Car, à travers cette cérémonie, le gouvernement apportait une réponse efficace à la principale revendication des avocats d’obédience anglophone.
D’autres mesures prises par le gouvernement vont de la création d’un comité interministériel pour étudier les revendications, aux enquêtes diligentées sur d’éventuelles atteintes aux droits de l’Homme et une meilleure considération, en passant par la traduction en anglais des Actes uniformes de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada).
Le 5 septembre 2019, Doh Jérôme Penbaga, le secrétaire d’État auprès du ministre de la Justice, chargé de l’administration pénitentiaire a demandé aux délégués régionaux de l’administration pénitentiaires, «à titre de rappel, de bien vouloir veiller à la stricte application des dispositions pertinentes du code de procédure pénale en matière d’exercice de la profession d’avocat».
Le 6 septembre 2019, dans une autre correspondance dont l’objet est «Libre exercice de la profession d’avocat devant les cours et tribunaux» destinée aux procureurs généraux près les cours d’appel des dix régions, Jean De Dieu Momo, le ministre délégué auprès du ministre de la Justice s’indigne des «entraves à l’exercice de la profession d’avocat notamment, les gardes à vue et détentions abusives/illégales prolongées…».
EDUCATION
Des doléances irréalistes et fantaisistes ont été posées depuis le 18 novembre 2016 à Yaoundé par les enseignants d’obédience anglophone. Qui dénoncent entre autres la «francophonisation» du sous-système éducatif anglo-saxon, la nomination des francophones aux postes de Doyen dans les facultés des universités de ces régions d’obédience anglophone, la faible représentativité des anglophones aux postes d’enseignants et personnels d’appui aux universités de Buea et Bamenda. Les anglophones en colère ne veulent non plus des professeurs francophones qui enseignent l’anglais à leurs progénitures. Encore moins des médecins francophones dans leurs hôpitaux. Ils exigent que les déclarations d’impôts et autres documents administratifs ne soient plus conçus qu’en langue française.
Le gouvernement a rendu publique une batterie de mesures : création d’un Comité interministériel ad hoc chargé d’examiner et de proposer des solutions aux préoccupations soulevées par les syndicats d’enseignants anglophones, mise à disposition d’établissements d’enseignement privé laïc et confessionnel d’une subvention spéciale de deux milliards de FCFA, recrutement de 1000 enseignants bilingues, diplômés de l’enseignement supérieur en particulier dans les matières scientifiques et techniques, création d’une section anglophone à l’École nationale d’administration et de magistrature (Enam). Malgré ces concessions, les requêtes corporatistes ont tourné en revendications politiques avec des slogans hostiles au pouvoir de Yaoundé. La tenue du Grand dialogue national apparaît donc comme un nouveau départ pour le Cameroun.
Jean Robert FOUDA