Coton africain: L’invasion silencieuse des jassides secoue la filière

Face à la chute des rendements liée à ces ravageurs du coton et aux marchés instables, les acteurs réunis à Douala du 8 au 11 avril derniers, ont misé sur la coopération régionale pour relancer la filière.
C’est un petit insecte qui fait trembler une industrie entière. Du 8 au 11 avril 2025 à Douala, la 17e réunion bilan du Programme régional de production intégrée du coton en Afrique (PR-Pica) s’est tenue dans un climat de vigilance extrême. En cause, l’explosion des attaques de jassides, ces ravageurs minuscules mais dévastateurs, responsables d’une baisse significative des rendements cotonniers dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre.
Au-delà des bilans traditionnels, l’heure était à l’alerte. « Cette réunion intervient dans un contexte de baisse drastique de la production », a martelé Mohamadou Bayero, Directeur général de la Sodecoton, lors de la cérémonie d’ouverture. Derrière les mots, une réalité brutale : champs ravagés, qualité de la fibre dégradée, producteurs découragés. Et un risque commun : voir s’effondrer un pilier économique vital pour des millions de familles rurales.
Car la filière cotonnière africaine, malgré ses vulnérabilités, reste une source majeure de devises et d’emploi. Mais elle est à la croisée des tempêtes : changement climatique, pression concurrentielle des fibres synthétiques, fluctuations du dollar et des cours mondiaux… autant de défis imbriqués qui appellent des réponses concertées. Face à cette complexité, le PR-Pica se positionne plus que jamais comme un espace stratégique. Objectif : mutualiser les recherches, harmoniser les pratiques, sécuriser les systèmes de production.
Pour le ministre de l’Agriculture et du développement rural (Minader), Gabriel Mbairobe, la priorité est claire : « renforcer la recherche agronomique régionale, promouvoir la formation, encourager la transformation locale ». La transformation, justement, pensent les participants à cette session, apparaît comme l’un des leviers majeurs de résilience. « En ajoutant de la valeur localement, les pays africains peuvent réduire leur dépendance aux cours internationaux et relancer une dynamique économique plus équilibrée. Mais cette ambition reste conditionnée à des politiques cohérentes et à un soutien technique renforcé aux producteurs », a argumenté un des participants.
Gabriel Mbairobe a également indiqué que le volet phytosanitaire reste cependant l’urgence absolue. A en croire le Minader, les jassides, en l’absence de solutions coordonnées, menacent de s’installer durablement. « Des essais de variétés résistantes et de stratégies de lutte intégrée sont en cours dans plusieurs pays, mais les résultats doivent encore être partagés et vulgarisés à grande échelle ».
Au terme de quatre jours de discussions donc, les acteurs de la filière sont repartis avec une feuille de route exigeante. Le coton africain, secoué mais pas coulé, joue désormais sa survie sur sa capacité à coopérer et à innover. « Une chose est sûre : face à l’invasion silencieuse, seule une riposte collective peut sauver l’or blanc des champs africains », a assuré Mohamadou Bayero, Directeur général de la Sodecoton.
Hélène Tientcheu