Contrebande: Plus de 50 milliards de pertes enregistrées en 2024

Tirée par les importations illégales en provenance du Nigeria, la contrebande a coûté 50,7 milliards de FCFA au Cameroun au cours de l’année écoulée, un déficit en hausse par rapport aux 44,6 milliards de 2023.

Chaque bidon de carburant, chaque tête de bétail et chaque colis de marchandises franchissant illégalement les frontières coûte cher au Cameroun. En 2024, les pertes liées au commerce transfrontalier informel se sont élevées à 50,7 milliards de FCFA, selon les chiffres publiés par l’Institut national de la statistique (INS). Une facture salée, qui s’ajoute à un déséquilibre commercial chronique, principalement causé par les importations illicites en provenance du Nigeria.

Ce déficit, en hausse par rapport aux 44,6 milliards de FCFA de 2023, confirme l’enracinement du phénomène. Plus inquiétant encore, seul le commerce informel avec le Nigeria a généré un déficit de 111,7 milliards de FCFA, représentant ainsi à lui seul plus du double des pertes enregistrées avec l’ensemble des autres pays voisins.

L’Extrême-Nord et le Nord du Cameroun concentrent plus de 70 % des importations informelles, selon l’INS. Et ce, malgré l’insécurité persistante dans ces régions, en particulier à cause des incursions de Boko Haram. Les réseaux de contrebande y sont pourtant bien établis. Ils acheminent en masse du carburant, des animaux vivants, des vêtements, des produits manufacturés et autres biens de première nécessité.

Le carburant nigérian à bas prix arrive en tête des produits les plus importés illégalement (22,1 % des flux), suivi du bétail (14,6 %). L’ampleur de cette activité est facilitée par les 1 500 kilomètres de frontière partagée avec le Nigeria, difficile à surveiller efficacement. Le dynamisme de l’économie nigériane, allié à la faiblesse du naira, rend ces produits bien plus compétitifs que ceux du marché local.

À l’inverse, les régions du Sud-Ouest, de l’Adamaoua et de l’Est ont vu leurs importations informelles baisser en 2024. Dans le Sud-Ouest, la crise anglophone a entraîné une chute de 38,7 % des flux illégaux. L’instabilité sécuritaire, les combats entre groupes séparatistes et forces gouvernementales, ainsi que l’effondrement de l’activité commerciale ont ralenti les échanges, y compris ceux de la contrebande. Même dynamique à l’Est et dans l’Adamaoua, où la présence de groupes armés venus de la Centrafrique, les routes dégradées et les problèmes logistiques ont contribué à une contraction des flux, respectivement de 3,3 % et 17,5 %.

Ce commerce parallèle, largement toléré ou ignoré dans certaines zones, échappe à toute fiscalité, fausse les prix du marché et prive l’État camerounais de recettes importantes. Surtout, il met en lumière la faiblesse de la régulation aux frontières et l’incapacité à formaliser une part importante des échanges avec les pays voisins.

Tant que des solutions durables ne seront pas mises en place avec le renforcement des contrôles, le développement des infrastructures frontalières, le soutien aux circuits officiels, le Cameroun continuera d’accuser des pertes massives sur ses frontières. Dans un contexte de pression budgétaire et de besoins sociaux croissants, chaque milliard qui se volatilise dans l’informel pèse un peu plus sur les finances publiques.

Par Julien Efila

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