Contrebande: Le Tchad écoule plus de 35 milliards de F de bétail

Un chiffre en forte progression qui confirme la domination de ce pays frontalier sur ce segment du commerce transfrontalier non enregistré.

35,69 milliards de FCFA. C’est le montant des exportations informelles de bétail en provenance du Tchad vers le Cameroun en 2024. Un chiffre en forte progression (+20,3 % en glissement annuel) qui confirme la domination de ce pays frontalier sur ce segment du commerce transfrontalier non enregistré.

Selon le rapport 2024 de l’Institut national de la statistique (INS), publié récemment, ces exportations, bien qu’illégales, ont représenté à elles seules 49,8 % des échanges informels entre les deux pays sur la période considérée. Le bétail devient ainsi le moteur de cette relation commerciale non régulée, facilitée par la perméabilité des frontières, notamment dans la région de l’Extrême-Nord, principal couloir d’entrée du bétail tchadien.

Cette performance permet au Tchad de se hisser au rang de deuxième fournisseur informel du Cameroun, derrière le Nigeria. Le pays totalise 27 % des importations informelles enregistrées en 2024, soit une valeur absolue de 71,7 milliards de FCFA, en progression de 15,1 % sur un an. Une remontée notable après la baisse enregistrée en 2023, souligne le rapport de l’INS.

Cette tendance ascendante continue de creuser un manque à gagner important pour les caisses de l’État, qui perd ainsi d’importantes recettes fiscales et douanières. La répartition géographique des flux montre que l’Extrême-Nord concentre 49,4 % de ces importations informelles, devant la région du Nord (20,8 %). Dans ces zones, des réseaux bien établis alimentent un commerce parallèle dynamique, malgré les risques sécuritaires, notamment la menace persistante du groupe Boko Haram.

Les carburants et lubrifiants restent les produits les plus échangés sur ce circuit parallèle, représentant 22,1 % des flux. Ils sont suivis de près par les animaux vivants, qui pèsent 14,6 % du volume total. Le reste est composé de produits manufacturés divers, allant des denrées alimentaires aux pièces détachées.

L’INS note cependant des baisses significatives dans certaines régions. Les importations informelles ont chuté de 38,7 % dans la région du Sud-Ouest, en raison de l’intensification de la crise sociopolitique anglophone qui entrave les circuits logistiques. L’Adamaoua et l’Est enregistrent également des replis respectifs de 17,5 % et 3,3 %, en grande partie à cause de la dégradation des routes, des difficultés d’accès et de la présence de groupes armés.

Autre facteur non négligeable : l’absence de contrôle rigoureux aux frontières, tant du point de vue douanier que vétérinaire. Cette faiblesse institutionnelle contribue à entretenir ce commerce parallèle, qui échappe à toute forme de traçabilité sanitaire ou fiscale.

Pour l’heure, les autorités camerounaises peinent à endiguer le phénomène. Les mesures de sécurisation des frontières et de renforcement des contrôles peinent à produire des résultats tangibles face à l’enracinement des pratiques informelles dans certaines communautés locales qui en tirent aussi des revenus de subsistance.

Par Julien Efila

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