CDEC-COBAC : Un bras de fer aux multiples rebondissements

La décision de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC) en date du 11 juillet 2024, demandant aux établissements financiers de suspendre temporairement le transfert des avoirs en déshérence dévolus à la Caisse de dépôts et de consignations (CDEC), a soulevé des questions sur la légitimité de cette intervention, entrainant la résistance de Yaoundé.
Suite à la correspondance du ministre des Finances, Louis Paul Motaze, en date du 05 juin 2024 adressée à la présidence de l’Association professionnelle des Etablissements de Crédit du Cameroun(Apeccam), avec pour objet : « Transfert des fonds et valeurs dévolus à CDEC par les établissements de crédits », les institutions financières avaient commencé à transférer les fonds et valeurs des comptes créditeurs dormants et inactifs, les comptes d’épargne inactifs qui n’ont enregistré aucune opération autre que celles initiées par l’établissement de crédit pendant une période de plus de huit (08) ans à la CDEC.
Bien parti pour soutenir les politiques de développement conformément à la réglementation en vigueur au Cameroun, ce processus va prendre du plomb dans l’aile, le 11 juillet 2024 avec une correspondance de la COBAC à l’Appeccam demandant à ces institutions de sursoir de façon temporaire au transfert de ces avoirs en déshérences.
Une situation qui a suscité l’ire de Yaoundé, ce d’autant plus qu’elle est dénuée de tout fondement juridique. Bien plus, elle empiète sur la souveraineté du pays. Une situation qui a fortement été décriée par le directeur général de la CDEC, Richard Evina Obam, dans une correspondance en date du 29 juillet adressée au ministre des Finances. Dans cette missive, le DG de la CDEC, fait état de l’ingérence de la COBAC dans l’activité nationale des dépôts et consignations, traduite par la signature de cette correspondance invitant les établissements financiers à sursoir au transfert des fonds dévolus à son institution, et d’autres part à prendre part à Libreville à une concertation au sujet des options d’encadrement des activités des caisses de dépôts et consignations au niveau de la CEMAC.

Bras de fer
C’est ainsi que dans une correspondance datée du 1er août 2024, avec pour objet : « suspension par la COBAC du transfert à la CDEC », le ministre d’Etat, SGPR, Ferdinand Ngoh Ngoh, va demander au Minfi de bien vouloir veiller avec la CDEC et en application de l’article 55 du décret du 15 avril 2011 portant organisation et fonctionnement de cet organisme, « à la poursuite effective, diligente et sereine du processus du transfert des fonds entamés ».
Une décision d’autant plus contestée par Yaoundé qu’elle vient mettre un terme au décret du premier ministre du 1er décembre 2023, fixant les modalités de transfert des fonds et valeurs, visant à sécuriser les avoirs en déshérence tout en préservant la stabilité du secteur financier ou encore à la loi régissant les dépôts et consignations du 14 avril 2008.
Bien plus, en dépit des micmacs de la COBAC, l’Etat du Cameroun va décider à travers l’arrêté du Minfi du 25 novembre 2024, fixant les modalités d’intervention de la CDEC, de renforcer l’opérationnalisation de celle-ci. Cet arrêté fixe les modalités d’intervention de cette institution sur les opérations de titre de créance et de titre de capital, lui permettant ainsi de se déployer sur les marchés de capitaux en tant qu’investisseur, toute chose qui ouvre la voie à une opérationnalisation complète de la CDEC sur les marchés de capitaux.
Désormais, la CDEC est habilitée à intervenir sur les titres de créances et de capital, tant au niveau national qu’international « dans les limites fixées par les règles prudentielles internes et la règlementation en vigueur ».
En tant qu’investisseur, le principal point à retenir est que la CDEC peut désormais prendre des participations dans le capital d’entreprises publiques et privées, ou encore acheter des parts sociales. Cette capacité d’intervention est essentielle pour soutenir le développement des entreprises, en particulier dans un environnement où l’accès au financement est crucial pour leur croissance.
Julien Efila